Exemples de comportements
Être distant
(dans la même veine que lointain, retiré, éloigné, réservé)
Des exemples
1. Depuis notre dernière altercation, je me sens distant d'elle.
2. Je le sens distant. Il est moins chaleureux, me parle peu de lui et me donne souvent l'impression d'être absent.
3. Cette relation ne me convient pas. Je veux prendre mes distances.
Qu'est-ce qu'être distant ?
" On ne peut se sentir distant " car il ne s'agit pas d'un sentiment (exemple 1).
De même on ne peut " sentir quelqu'un d'autre distant " (exemple 2), d'abord parce qu'il est impossible de " ressentir " l'autre, ensuite, parce que la distance n'est pas une émotion. La distance est la concrétisation de diverses attitudes et comportements qui se manifestent par l'éloignement : on est plus froid, on se tient à distance, on s'éloigne, on se retire, se montre réservé, cela de différentes façons qui sont propres à chacun.
La distance peut-être vécue intérieurement, comme ce pourrait être le cas dans le premier exemple : je continue mes activités habituelles, mais je suis moins touché, moins investi dans mon rapport avec elle. Ici, le comportement a peu changé, c'est l'attitude qui n'est plus la même. La distance peut-être plus apparente, comme dans le deuxième exemple, où les comportements ont changé.
Dans le troisième exemple, il ne s'agit pas de sentiments mais bien d'un comportement qui exprime mes sentiments. Ici, le terme distance est encore utilisé comme image pour traduire la volonté de rompre en douce.
À quoi sert la distance ?
L'attitude ou le comportement distant servent à manifester des émotions. En général, il s'agit d'un mécontentement quelconque dont l'intensité peut varier de la colère à la simple contrariété. La bouderie est un bel exemple d'éloignement chargé d'émotions qu'on se refuse d'exprimer.
Figé
((bloqué, gelé, paralysé)
Des exemples
J'aurais voulu lui répondre mais j'étais littéralement paralysé.
Je suis restée figée devant sa colère.
Une attitude comme la sienne me bloque.
J'étais sur le flanc de la montagne, devant ce qui me semblait un gouffre, paralysée par la peur.
Qu'est-ce que c'est ?
Cet état est vécu comme une incapacité. J'ai l'impression que tout s'arrête en moi et que je deviens inerte. En fait il ne s'agit pas d'une incapacité mais d'une action : je fige, me paralyse, m'arrête, je cesse de ressentir une émotion ou encore, j'en retiens l'expression. Parfois donc, c'est le ressenti que je fige, parfois c'est son expression.
À quoi ça sert ?
On pourrait dire que je m'inflige un tel blocage par instinct de protection. En effet, en une fraction de seconde, je juge qu'il est dangereux de demeurer en contact avec ce que je ressens ou encore de l'extérioriser.
Voici les exemples précédents, transformés de manière à traduire mon action d'inhibition.
Exemple 1
" Je ne suis pas prêt à assumer ce que je lui aurais dit donc je me tais " ou encore : " Devant ses propos, j'ai eu un sentiment très fort mais interdit. Je l'ai immédiatement bloqué. "
Exemple 2
" Je n'ai pas osé montrer ma peur devant sa colère. J'ai fait en sorte qu'il ne puisse pas la voir. "
Exemple 3
" Je ne suis pas confiant devant son attitude ; donc je m'abstiens de m'exprimer. "
Exemple 4
" La pente me semblait si abrupte que j'avais la certitude que je la dévalerais si je bougeais le moindrement. Je faisais donc tout pour demeurer immobile. "
La timidité
La timidité n'est ni une maladie ni un trait de caractère, mais un trouble bénin que beaucoup apprennent à surmonter avec l'expérience de vie. La timidité ne constitue pas un véritable handicap pour la plupart des gens.
Il y a des situations particulièrement intimidantes. Passer un examen, prendre la parole en public ou engager la conversation avec des inconnus n'est pas chose facile, surtout la première fois. Généralement, avec le temps et l'expérience, la confiance en soi augmente et la gêne disparaît. Car s'exposer, oser affronter le regard des autres, cela s'apprend.
Certains s'initient tout naturellement aux interactions sociales. Les timides réussissent en général à mener une vie en apparence satisfaisante et souvent organisée de manière à éviter les situations embarrassantes. L'évitement leur permet de camoufler, derrière une froideur ou un désintérêt apparent, une hypersensibilité au jugement d'autrui.
C'est lorsque l'intensité de la réaction émotive interfère significativement avec le fonctionnement de la vie sociale de l'individu que l'on parlera de phobie sociale et qu'il faudra penser à un traitement psychologique.
Lorsqu'elle est occasionnelle et limitée, la timidité n'empêche pas de vivre heureux. C'est le cas d'une personne qui se trouve à l'aise avec sa famille, ses amis, un entourage professionnel familier, et se plaît dans ce cadre rassurant. Même si elle éprouve des craintes face aux inconnus, elle s'arrange, dans la mesure du possible, pour ne pas y être confrontée. Plus difficile à gérer est la timidité chronique et généralisée. Celle-là témoigne d'un malaise intérieur et de difficultés relationnelles qui entravent douloureusement tout épanouissement personnel.
Exemple
Peu causant, Claude ne dérange personne. Conciliant, il se plie aux désirs de ses proches, dans le privé comme au travail, car il n'a qu'une obsession: être aimé. Mais en se réfugiant dans la passivité par peur de déplaire ou de ne pas se montrer à la hauteur, il se condamne presque à coup sûr à l'isolement.
Claude s'étonne : pourquoi les autres le rejettent-ils alors qu'il est prêt à toutes les concessions, qu'il préfère le silence au conflit, qu'il cherche constamment à faire plaisir ? Tous ses sacrifices seraient-ils inutiles ? Qu'y a-t-il de mal à être gentil ? Comment expliquer que certains de ses collègues brusques et insensibles ont plus de succès que lui avec les femmes ?
Incapable de nouer d'authentiques amitiés, fréquemment déçu en amour, Claude en vient à se replier sur lui-même et à fuir les contacts. Il se sent incompris et victime d'un destin injuste.
Claude craint les autres dont il souhaite tant être reconnu. Et plus les autres sont nombreux, plus il se sent menacé. Le pire, pour lui, ce sont les soirées en société.
Malgré ses efforts et la lecture de quelques livres sur le sujet, Claude se demande sans cesse si ce qu'il fait est bien, quelle impression les autres ont de lui, s'il aurait dû faire les choses différemment, comment les gens vont réagir à ses faits et gestes.
Il a toujours l'impression d'être jugé, d'être sur la sellette. Un regard, un sourire, un silence, et il se retrouve déstabilisé. À chaque fois, il a l'impression de passer un examen, d'être coupable de quelque chose.
Christophe ANDRE et Patrick LEGERON, psychiatres à l'Hôpital Sainte - Anne à Paris analysent dans leur livre " La peur des autres " (Editions Odile Jacob, 1998) le trac, la timidité et d'autres formes d'anxiété sociale, dont ils décrivent les manifestations psychologiques les plus fréquentes :
- Appréhension à se retrouver en point de mire de la part d'autrui; se sentir observé, se croire évalué, penser que cette évaluation est négative.
- Perception excessive de sa vulnérabilité : se sentir fragile, transparent aux yeux d'autrui, peu apte à se protéger, à se défendre, maladroit pour se contrôler et contrôler la situation, peu performant.
- Auto dévalorisation importante de ses propres comportements sociaux, même adaptés.
- Surévaluation des exigences existant dans une situation ou une relation donnée.
- Sentiment d'une agressivité latente ou potentielle de la part d'autrui : les autres sont plus puissants, plus compétents, et peuvent agresser en paroles ou en actes.
- Hypervigilance portée à ses propres manifestations d'anxiété.
La timidité, selon ces auteurs, est un type particulier d'anxiété sociale non pathologique, " exprimant une manière d'être durable et habituelle, marquée par une tendance prononcée à se tenir en retrait et à éviter de prendre l'initiative dans tout type de situation sociale, une gaucherie lors des interactions sociales, malgré un désir relatif de se confronter à certains échanges ". La timidité n'exclut pas des capacités d'adaptation, comme en témoignent de nombreuses personnalités du spectacle ou des médias qui racontent comment ils ont surmonté leur timidité en choisissant une profession les poussant à affronter ce qui les angoissait.
Les personnes timides prennent moins souvent la parole que les autres, sourient moins, regardent moins dans les yeux, mettent plus longtemps à répondre ou à relancer la conversation ; les temps de silence sont plus fréquents dans leurs discours. Leur registre de mimiques et d'expressions est moins riche.
Les thérapies cognitivo - comportementales proposent des techniques qui permettent d'affronter progressivement les situations redoutées tout en travaillant sur les pensées négatives qui sont à l'origine de la timidité. Nous verrons quelques-unes unes de ces techniques plus loin dans ce texte.
La vie sentimentale, sociale et professionnelle des timides est marquée par les occasions perdues et aboutit souvent à la solitude.
Si nous nous imposons certains actes par peur du jugement d'autrui, et surtout par la peur de ne pas être toujours " aimables ", nous empruntons des rôles successifs qui nous font perdre de vue qui nous sommes. Ces rôles nous rendent étrangers à nous-mêmes. Ils nous coupent de l'essentiel de ce que nous vivons. Il ne reste que le vide et la crainte d'être démasqué. A force de ne rien laisser passer de leurs émotions, de leurs idées personnelles, comment les timides pourraient-ils découvrir ce qu'ils tiennent si fortement caché ? Pensant que " de toutes les façons les autres n'ont pas de temps à perdre à écouter leurs histoires ", il leur semble plus naturel de faire partie de ceux qui écoutent que de ceux qu'on écoute.
Personne ne peut se sentir bien s'il est confronté à un sentiment d'inexistence ; il n'y trouve que solitude et un profond désarroi. Dans cette méconnaissance de lui-même, dans cette non-réalisation, il est plus que jamais la proie du désir d'autrui : il n'existe plus que dans le regard des autres, seuls capables alors de lui donner vie. Il serait préférable que nous laissions s'exprimer davantage nos sentiments et
nos pensées, parce qu'en les disant nous pouvons mieux les connaître, et qu'ainsi nous donnons la chance aux autres de nous reconnaître pour ce que nous sommes.
Parler, c'est prendre un risque. Risque d'être désapprouvé, d'entrer en conflit, de montrer ses faiblesses. Pire, d'être blessé. Mais parler, c'est aussi et surtout une chance : de dialoguer, d'approfondir la relation avec l'autre, de se montrer tel qu'on est... et même d'être apprécié !
L'impatience
Des exemples
1. Le comité s'attarde sur des détails sans importance alors qu'il est clair que nous ne passerons pas à travers de l'agenda. L'impatience me gagne
2. Le trafic avance à pas de tortue. Que de temps perdu !
3. Le patineur trépigne sur son banc en attendant l'évaluation des juges.
Qu'est-ce que c'est ?
Je suis impatiente lorsque je m'occupe à quelque chose qui est sans importance à mes yeux en négligeant, au même moment, quelque chose qui a de l'importance pour moi.
L'impatience peut être agréable si on vit la situation présente en attendant un moment qu'on espère heureux, comme c'est le cas dans l'exemple du patineur. L'émotion est désagréable et s'accompagne rapidement d'irritation lorsqu'on accepte de vivre trop longtemps une situation qui n'a pas de sens.
Il est important de distinguer l'impatience de l'impulsivité. L'impulsif est une sorte d'impatient chronique qui cherche souvent à se débarrasser de ce qu'il vit dans le présent. Mais ce n'est pas parce qu'il a mieux à faire qu'il s'impatiente. L'impulsif est irrité parce que son émotion présente est inconfortable. C'est d'elle qu'il cherche à se débarrasser. Contrairement à ce qui se passe dans l'impatience, le vécu actuel de l'impulsif a beaucoup de sens. Mais, pour une raison ou pour une autre, il refuse de la vivre et de l'assumer.
À quoi ça sert ?
Mon impatience est le signe que je me consacre à une activité qui a peu d'importance à mes yeux, en ce moment, alors que je néglige une chose qui en a.
L'exemple 1 est typique : je considère que nous perdons notre temps sur des sujets qui ont moins d'importance que ceux que nous devrons laisser tomber à cause de cela.
L'exemple 2 est du même genre : je pourrais employer mon temps à quelque chose de beaucoup plus valable à mes yeux que d'attendre aux feux de circulation.
L'exemple 3 illustre la même chose mais avec une connotation agréable : il y a peu de chose, dans le présent du patineur, qui puisse capter son intérêt tant il a hâte de connaître sa note.
La culpabilité
La culpabilité n'est pas une émotion en soi. C'est une expérience mixte qui comprend des sentiments, mais pas toujours ceux qu'elle laisse supposer. C'est pourquoi il est nécessaire d'examiner soigneusement son contenu si on veut s'informer précisément de ce que l'on vit.
Il y a la bonne culpabilité et la mauvaise culpabilité. C'est comme pour le cholestérol, l'une est saine, l'autre malsaine ! Vous trouverez ci-dessous la description de ces deux expériences émotives.
La culpabilité saine
Un exemple
Impulsivement, emportée par ma colère devant le fait que mon ami m'a fait faux bond, je lui lance une série d'insultes. Mon attaque vengeresse a porté ses fruits : il est atterré et profondément blessé. Je suis dans tous mes états, la culpabilité m'envahit.
Qu'est-ce que c'est ?
C'est l'expérience que je vis quand je pose délibérément un geste qui est en désaccord avec mes valeurs. La culpabilité saine suppose toujours deux choses :
1. que j'aie dérogé à mes valeurs et standards
2. et que j'avais le choix de le faire.
Le fait que mon expression soit impulsive n'enlève pas le caractère libre de mon action. La colère ne m'a pas emportée. Je me suis laissée entraîner par ma colère.
À quoi ça sert ?
Ma culpabilité est un terme générique recouvrant un ensemble d'émotions. Je suis en colère contre moi d'avoir outrepassé mes principes. Je n'admets pas de blesser injustement et je viens de le faire. Je m'en veux aussi d'avoir cédé à l'impulsion. En outre, j'ai de la peine d'avoir fait mal à mon ami que j'aime. Je le regrette, car il ne mérite pas un tel traitement.
L'action que j'ai posée a créé un déséquilibre en moi. Ce déséquilibre consiste essentiellement en un désaccord avec moi. La culpabilité m'indique donc que j'ai été infidèle à moi-même dans une situation où j'avais le choix d'être fidèle à moi.
La culpabilité - camouflage
Nous avons présenté la culpabilité saine. Nous présentons maintenant l'autre forme de culpabilité, celle qui est malsaine. La désigner par le terme " camouflage " donne immédiatement un aperçu de ce qu'elle a de malsain.
Un exemple
Ma soeur désire fortement nous accompagner, mon ami et moi, pour nos vacances annuelles. Elle vient de se séparer et je la sais fragile. J'aime beaucoup ma sœur et trouve difficile de refuser sa demande car elle sera très déçue. Par contre, je nous imposerais un gros sacrifice à mon ami et à moi en l'invitant à partager nos vacances. Je me trouve égoïste et je me sens coupable.
Qu'est-ce que c'est ?
C'est un déguisement de mon refus d'assumer mes propres désirs, sentiments ou choix. Dans l'exemple, je sais ce que je veux mais je ne le porte pas.
Pourquoi la considère-t-on comme une émotion mixte ? Parce qu'elle contient plusieurs émotions dont certaines sont habilement masquées. Dans cette culpabilité on trouve généralement de la colère, de la peur et parfois de la peine. Colère contre le fait de devoir porter ce que je vis ; colère contre celui que je tiens responsable d'être dans la situation de prendre une position que je trouve difficile à prendre ; peur d'afficher mes priorités ; peur des conséquences de mon choix ; peur de montrer ma colère ; peine à l'idée de décevoir...
À quoi ça sert ?
À éviter d'assumer mes actes
La culpabilité diminue à mes yeux ma responsabilité dans le choix que je ferai. Mon action est moins grave car je la pose "à regret". Dans l'exemple ci haut, j'ai moins l'impression d'être égoïste si je me sens coupable. J'obtiens donc grâce à mes yeux. Dans certains cas, sous prétexte de culpabilité, je n'agis tout simplement pas.
À neutraliser la réaction de l'autre
Si j'avoue que je pose un geste avec culpabilité, l'autre devrait m'en tenir moins rigueur. L'aveu de ma culpabilité est donc une manière de manipuler pour diminuer les conséquences de mon geste.
La culpabilité - camouflage a remplit souvent les deux fonctions à la fois : me donner bonne conscience et contrôler la réaction de l'autre. Elle est pernicieuse parce c'est un subterfuge pour éviter de s'assumer.